Tous les dimanches à Paris, un Bal qui rassemble tous les genres
« Don’t want a short dick man » : paroles explicites sur fond de latin house et de biguine électrique. Sur le dance-floor, les filles rivalisent de pauses majestueuses et tenues estivales ! La jupe est très courte, voire inexistante, et le décolleté savoureux. Perchées sur d’inévitables mules en strass, le cheveu est travaillé et le Rimmel ne coule pas.
Les filles piaillent, se haranguent, se prennent en photo et agitent leur bassin avec vigueur, à faire pâlir de jalousie DonatellaV. A la soirée Escualita, le transsexuel est 100 % d’origine contrôlée et ne plaisante pas avec l’authenticité ! La langue dominante est l’espagnol.
Colombiennes, Vénézuéliennes, Équatoriennes, Argentines, Péruviennes tiennent le haut du pavé. Mais on y rencontre presque un tour du monde : Marocaines, Algériennes, Françaises, Calédoniennes, Les Tahitiennes raflent presque à tous les coups les premiers prix des concours de beauté organisés régulièrement par Diana Elisabeth, l’énergique directrice artistique.
Elle est aussi la MC du lieu, et se met volontiers en scène avec des bodybuildeurs généreusement montés dont elle s’occupe avec ardeur. Le public adore. Jeunes Beurs secs et athlétiques, bourgeois en costume cravate, lesbiennes en perdition et clubbers branchés s’agitent et se croisent avec une bonne humeur qui défie toutes les lois de la cohabitation. Pas besoin de montrer sa carte de membre.
Les étiquettes sont laissées au vestiaire, toutes les tendances ou sexualités sont représentées et, chose curieuse, s’harmonisent : fait suffisamment rare dans le paysage du clubbing pour être signalé ! Fouad Zeraoui, l’organisateur connu pour avoir mis sur pied les soirées Black Blanc beur, s’est inspiré librement de l’Escualita de New York pour en créer son pendant parisien.
« Là-bas, un public radicalement différent du reste des clubs new-yorkais s’y pressait et se mélangeait avec la communauté latino, la sauce prenait et le résultat était magique. J’ai eu envie de tenter le coup ici. » Le pari n’était pas gagné. Les trans ne sont pas forcément les bienvenues dans le monde de la nuit. Elles sont fréquemment refoulées et humiliées à l’entrée des boîtes, voire victimes de chantages, quand elles arrivent à passer la porte, des commandes de bouteilles leur sont fortement conseillées, si elles veulent poser leurs fesses sur les banquettes !
Elisabeth s’explique, « Ici, on est à l’abri de l’exclusion, c’est une famille où toutes les races et les couleurs se mélangent. Notre culture n’est pas niée comme à l’extérieur où les gens finalement nous perçoivent comme un matériel sexuel qu’ils délaissent et méprisent une fois utilisé. »
Fouad acquiesce : « En France, il y a une vraie hypocrisie. Les trans sont dénigrées. Ici, c’est un lieu convivial où toute le monde se respecte. » Escualita en espagnol veut dire petite école (de tolérance).